Immigration Marocaine en France Ê
Approche qualitative et quantitative de l'immigration marocaine en France
Dès la fin du siècle dernier la France fut un pays
d'immigration. En 1881, la France compte déjà un million d'étrangers,
qui représentaient 2,7% de l'ensemble de la population. La France se plaçait
entre 1921 et 1930 au second rang des pays d'immigration dans le monde après
les Etats-Unis.
La baisse de la fécondité amorcée dès le milieu du XVIII siècle et
les conséquences des guerres successives qui ont entraîné une décroissance
démographique, ont provoqué
la pénurie de main d'œuvre pour un pays qui s'industrialisait. Pour remédier
à ce manque de main d'œuvre, la France a eu recours aux travailleurs étrangers
qui ont contribué à la richesse et à la diversité de la population
française.
? Évolution historique de l'immigration marocaine en France.
? Les caractéristiques de l'immigration marocaine en France.
? Flux migratoire des Marocains en France.
? La place des marocains dans la société française.
L'immigration du point de vue du pays d'accueil
Compte tenu de la difficulté à isoler l'immigration
marocaine du champ de l'immigration en général en France, nous évoquerons
dans ce chapitre les difficultés juridiques auxquelles sont confrontées
les communautés immigrées et donc y compris la communauté marocaine.
? La législation française en matière de l'immigration.
? L'immigration et les violations des droits de l'Homme en France.
L'immigration marocaine du point de vue du pays d'origine
Depuis le 1er juin 1963, date de la première
convention de main d'œuvre et du premier protocole sur la formation
professionnelle, l'activité diplomatique entre la France et le Maroc,
concernant le flux migratoire s'est traduite par l'adoption de plus d'une
vingtaine d'instruments c'est-à-dire des accords, des procès verbaux,
des conversations, des conventions, des arrangements administratifs.
? La convention de la sécurité sociale et son impact sur la femme marocaine.
? La convention de la sécurité sociale et son impact sur les travailleurs.
? Le comportement de l'administration marocaine vis-à-vis des marocains en France.
Évolution
historique de l'immigration marocaine en
France
L'immigration marocaine en
France est un phénomène ancien. C'est vers 1910 que l'ont peut situer le
début du mouvement migratoire des
Marocains vers la France : entre
1914 et 1918, la France comptait déjà plus de 15 000 travailleurs marocains.
L'immigration marocaine en France n'a connu sont ampleur important qu'à partir
des années 1970. L'arrêt de l'immigration décidé par le gouvernement,
l'échec de la politique des retours et le recours au regroupement familial
amorcé dès 1974, ont contribué à la transformation du mouvement migratoire
marocain en France.
Lors des derniers recensements
de 1990, les Marocains occupent le troisième rang après les Portugais et les
Algériens. Ils représentent 15,9 % de l'ensemble des étrangers en France soit
572 652 Marocains sans compter les 68 000 qui ont acquis la nationalité
française.
On peut distinguer trois temps
différents qui nous permettent de caractériser le processus du mouvement
migratoire marocain en France :
*
Le premier temps se situe entre les deux guerres. Il s'agit des premières tentatives de
l'immigration collective organisée. Cette période a été caractérisée par
une immigration de contingents composés :
-
de travailleurs originaires de la région de sous, recrutés sur
contrats, affectés principalement pour une durée temporaire aux usines
d'armement , aux mines et aux secteurs agricoles. Ce n'est qu'en 1938 que fut
créé au Maroc un service d'émigration pour assurer la sélection, le
recrutement et l'acheminement des travailleurs marocains vers la France.
-
de militaires originaires du Moyen et du Haut-Atlas affectés à la
résistance contre les Allemands pendant la deuxième guerre mondiale.
*
Le deuxième temps commence dès le lendemain de la deuxième guerre
mondiale (les Trente glorieuses) jusqu'à l'arrêt de l'immigration décidé par
le gouvernement à cause du ralentissement de la croissance économique au
début des années 1970. Il s'agit
d'une immigration temporaire de main d'œuvre, composée d'hommes seuls.
* En fin une troisième phase, couvre la période de 1974 à nos jours. En 1974, le ralentissement de la croissance économique conduit le gouvernement à décider l'arrêt de l'immigration, sauf dans le cadre du regroupement familial et de demandes spécifiques émanant d'employeurs. L'échec de la politique d'aide au retour mise en place par le gouvernement, et la crainte des difficultés de revenir en France ont poussé les immigrés marocains installés en France, à prolonger leur séjour et à faire venir leur famille. C'est à partir de cette date charnière que l'immigration marocaine va connaître des mutations profondes dans sa structure, sa composition, ces difficultés, ses revendications, son évolution, etc.
Les
caractéristiques de l'immigration marocaine en France
L'immigration marocaine en France a changé de
nature. Elle se renouvelle constamment ; d'une immigration temporaire à une
immigration durable, d'une immigration individuelle composée d'hommes seuls à
une immigration familiale composée pour l'essentiel de femmes et d'enfants ;
d'une immigration masculine à une immigration hétérogène et diversifiée
(rajeunissement, féminisation, mobilité sociale, naturalisations, etc.).
* D'une immigration
individuelle et temporaire à une
immigration durable et familiale.
Au fil des années et depuis près d'un siècle, le
phénomène migratoire marocain en direction de la France, ne cesse de se
transformer et se sédentariser. Immigration
de main d'œuvre à l'origine, elle devient de plus en plus une immigration
définitive. Plusieurs indicateurs témoignent de cette transformation profonde.
* L'immigration familiale
L'immigration familiale des Marocains en France est
l'une des caractéristiques qui a marqué l'évolution du mouvement migratoire
marocain en France. De 1963 à 1995, environ 310 686 Marocains sont entrés en
France dans le cadre du regroupement familial. Le nombre d'effectifs de
l'immigration familiale marocaine, n'a connu son ampleur importante qu'à partir
de 1973.
Depuis 1973, l'immigration familiale marocaine occupe
la première place en ce qui concerne le nombre de personnes entrées dans le
cadre du regroupement familial. Mais sous l'effet des lois Pasqua qui ont durcit
les procédures du regroupement familial en 1993, le nombre des entrées des
Marocains dans le cadre du regroupement familial et en régression constante. Il
est passé de 11 343 personnes en 1992 pour atteindre le plus bas nombre qui n'a
pas été enregistré depuis 1967, soit 3 628 personnes
* L'installation durable des
Marocains en France
Plusieurs indicateurs témoignent aujourd'hui de
l'installation durable et définitive des immigrés marocains en France :
§
L'allongement
de la durée de séjour.
§
Les
mariages mixtes ; la part des ressortissants marocains dans les unions mixtes
est passée de 5,4% soit 1 101 mariages mixtes en 1981 à 16,6% soit 5 015
mariages mixtes en 1992 (au second rang après les Algériens 18,3 %).
§
Au niveau
du nombre d'acquisition de la nationalité française ; les Marocains sont
aujourd'hui les plus nombreux à acquérir la nationalité française. Au cours
de ces dernières années, avec 20,8 % de l'ensemble des acquisitions entre 1991
et 1994 contre seulement 3,2% entre 1966 et 1969, les Marocains ont fourni le
contingent le plus important de Français par acquisition.
§
La
scolarité des enfants ; le développement du regroupement familial a entraîné
une augmentation du nombre d'enfants marocains scolarisés dans les écoles, les
collèges, les lycée et les universités. Selon le ministère de l'éducation
nationale, au cours de l'année scolaire 1991 - 1992, les élèves marocains
représentent 25,3 % de l'ensemble des élèves des écoles publiques et
privées du premier degrés soit un total de 158 629 élèves marocains dont 2
006 dans les écoles privés. Les élèves marocains sont les plus nombreux
également dans les collèges et les lycées (près du quart de l'ensemble des
élèves étrangers 24,1%), soit un total de 100 247 élèves marocains. Les
étudiants marocains sont les plus présents également dans les universités.
Ils sont 24 036 étudiants inscrits en 1991 -1992 parmi les 137 000 étudiants
étrangers inscrits la même année dans les universités française.
§
Le nombre
très réduit des retours dans le pays d'origine.
§
L'accès
à la propriété; d'après les recensements de 1990, sur 190 664 ménages
recensés, 17 % étaient propriétaires de leur logement.
Flux
migratoire des Marocains en France
* Les entrées au titre du
travail:
* Les entrée au titre de la
famille
Les entrées au titre de la famille peuvent
intervenir dans le cadre de plusieurs procédures : regroupement familial,
conjoints de français, parents d'enfants français…
En 1995, 3628 Marocains ont été autorisés à
entrer en France dans le cadre du regroupement familial contre 11343 en 1992. En
effet, depuis 1990 les entrées pour motif familial des Marocains est en nette
régression. Cette baisse qui a été sensible à partir de 1993 s'explique par
la mise en place des lois Pasqua qui ont dressé des obstacles aux procédures
du regroupement familial.
En dépit de la reconnaissance solennelle par les
traités internationaux ratifiés par la France, tels que la Déclaration
universelle des droits de l'Homme, la Convention européenne de sauvegarde des
droits de l'Homme et la Convention internationale sur les droits de l'enfant, le
droit de vivre en famille, l'un des droits fondamentaux de la personne humaine
ainsi que les mariages mixtes sont de plus en plus l'objet de suspicion et de
restriction.
Devant le contexte économique difficile, les
exigences d'un revenu stable et un logement décent sont des conditions
difficiles à surmonter. De même il est incompréhensible de refuser le
regroupent familial partiel et de ne pas prendre en compte, en matière du
regroupement familial, le revenu des prestations familiales. Il faut souligner
que ces entraves qui ont créer au fil des années, des situations de séjour
irrégulier, ce qu'on appelle aujourd'hui des "clandestins" et que le
gouvernement actuel tente de réexaminer leurs situations par une procédure
exceptionnelle.
* Les travailleurs
saisonniers
En 1995, 4744 travailleurs saisonniers marocains ont
été autorisés à travailler en France. Les entrées des travailleurs
saisonniers marocains sont en légère régression depuis 1992.
* Implantation territoriale
Les Marocains sont inégalement répartis sur le
territoire français. L'Ile-de-France est la région qui accueille le plus de
Marocains. Ils sont 155 674 à résider en Ile-de-France, 40 547 dans le
Laguedoc-Roussillon, 26 749 dans la région du Centre, 24 611 en Aquitaine, 19
776 en Auvergne, 19 024 en Alsace, 19 776 en Bourgogne, 16 507 en
Franche-Comté, 12 958 en Corse, 12 494 dans la région Champagne-Ardenne, et
une faible proportion des Marocains est réparti dans les régions d'Auvergne,
les Pyrénées-Orientales, la Bretagne, etc.
La
place des Marocains dans la société française
* La composition
par sexe et par tranche d'âge
Le développement du regroupement familial chez les
Marocains en France a entraîné une diminution de l'écart entre le nombre des
hommes et le nombre des femmes ainsi que le rajeunissement et la diversité des
tranches d'âges au sein de cette communauté. Ainsi, lors des derniers
recensements de 1990, sur un total de 572 652 Marocains résidents en France, on
compte 321 943 hommes et 250 709 femmes. Cet écart entre les hommes et les
femmes parmi les Marocains en France qui était trop important avant les années
1970, à tendance à diminuer au
fil des années.
Un autre phénomène qui caractérise aujourd'hui la
structure par âge des Marocains en France, se manifeste sensiblement dans le
rajeunissement et la diversité de cette communauté. Ainsi en 1990, environ 259
181 Marocains avaient moins de 19 ans, 307 331 (entre 20 ans et 64 ans). En
revanche le nombre de ceux qui avaient plus de 65 ans était plus faible, 6 140
seulement. La faiblesse de la proportion de cette tranche d'âge parmi les
Marocains en France est liée sans doute au retour au pays d'origine et aux
décès.
* Les catégories
socioprofessionnelles et les secteurs d'activité des Marocains en France
Selon une enquête sur l'emploi réalisée par
l'INSEE en 1995, le nombre des actifs occupés marocains compte 153 000
travailleurs. La plupart sont ouvriers : c'est le cas de 63% d'entre eux.
Seulement 30% qui se trouvent dans cette catégorie socioprofessionnelle
sont qualifiés. On compte aussi 19% des actifs occupés marocains dans la
catégorie socioprofessionnelle des employés. Ils sont 7% à exercer les
professions intermédiaires (avocats, médecins, ingénieurs, etc.). 5% sont
artisans, commerçants ou chefs d'entreprises. Enfin 5% des immigrés marocains
sont cadres contre 13% pour l'ensemble de la population active occupée.
C'est dans le tertiaire que travaillent la majorité
des Marocains : 53% des actifs occupés sont employés dans ce secteur qui
couvre les services aux entreprises, les services aux particuliers, les
transports, le commerce, etc. Les Marocains se distinguent par leur présence
importante dans l'agriculture : 8% de Marocains travaillent dans ce secteur
contre 5% de la population active occupée totale. 16% sont employés dans la
construction notamment le bâtiment et 23% dans l'industrie ; Il sont 8% dans
l'industries des biens intermédiaires et 6% dans l'industrie automobile.
* Taux de chômage des
immigrés marocains en France
La
population immigrée en France est particulièrement confrontée au problème du
chômage en France. Le taux de chômage des immigrés est en progression
constante ces dernières année. Il est passé de 16.6% en 1990 à 20% en 1995,
soit 8 points de plus que la moyenne nationale. Le chômage touche plus
fortement les immigrés marocains ; environ une femme active sur deux est
privée d'emploi et un homme actif sur trois cherche un travail. Avec les Turcs,
les immigrés marocains enregistrent le taux de chômage le plus élevé en
France.
Selon l'enquête sur l'emploi réalisé 1995 par
l'INSEE, le taux de chômage des immigrés marocains atteint
28.7 % chez les hommes (la moyenne nationale est de 9.8 %)
et 43.3% chez les femmes (la moyenne nationale est de 13.9 %).
Cette situation s'explique par le fait que les
immigrés marocains sont plus présents dans les catégories
socioprofessionnelles les plus touchées par le chômage (ouvriers, employés).
Ils sont les plus vulnérable au chômage parce qu'ils
occupent très souvent les secteurs en déclin (industries minières,
manufacturières) ou subissent fortement les aléas de la conjoncture
(bâtiment).
Comme tous les jeunes immigrés ou issus de l'immigration, le taux de chômage chez les jeunes d'origine marocaine est plus alarmant. Obstacles à la formation et à l'emploi, sans qualification, discrimination à l'embauche, ces jeunes se retrouvent sans emploi. Fragilisés ainsi, ils sont souvent exposés à la délinquance, la toxicomanie, la violence, l'intégrisme, etc.
La
législation française en matière de l'immigration
* La loi du 11 mai 1998.
La loi n° 98-349 du 11 mai 1998 relative à
l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile a été
publiée au Journal officiel du 12 mai 1998.
En vertu de ce nouveau texte, la rétention
administrative est portée à une durée maximale de 12 jours (elle était de 10
jours dans la loi précédente). La loi du 11 mai 1998 supprime l'effet
suspensif de l'appel du parquet en matière de rétention.
La nouvelle loi modifie le délai de recours
administratif pour contester l'arrêté de reconduite à la frontière en le
portant lui aussi à 48 heures et à 7 jours en cas de notification postale.
L'interdiction administrative du territoire est supprimée.
En ce qui concerne l'entrée sur le territoire, le
certificat d'hébergement est supprimé, et remplacé par une attestation
d'accueil. Le refus de visa devra être motivé lorsque le demandeur est membre
de la famille d'un ressortissant de l'Union Européenne ou de la Communauté
économique européenne, conjoint ou enfant d'un Français, bénéficiaire d'une
demande de regroupement familial, réfugié, titulaire d'une rente d'accident du
travail ou de maladie professionnelle, a servi dans une unité française ou
alliée, ou enfin est signalé aux fins de non-admission au SIS.
C'est en matière de titre de séjour que la loi du
11 mai 1998 se montre la plus féconde. Les ressortissants de l'Union
européenne et de la Communauté économique européenne, exerçant une
activité professionnelle en France, ainsi que les membres de leur famille,
seront dotés d'une carte valable 10 ans, puis à validité permanente. La carte
de séjour temporaire s'enrichit de nouvelles catégories : scientifique,
artiste, situation personnelle et particulière, personne dont l'état de santé
nécessite une prise en charge médicale, et enfin bénéficiaire de l'asile
territorial. Les retraité et leurs conjoints, titulaire d'une pension versée
en France, seront dotés d'une carte de 10 ans, renouvelable de plein droit.
Enfin, il est institué une "commission du titre de séjour",
consultée lorsque le Préfet envisage de refuser la délivrance ou le
renouvellement d'une carte temporaire ou de résident de plein droit.
Enfin, les dispositions concernant l'asile sont
extraites de l'ordonnance de 1945 et replacées dans la loi du 25 juillet 1952.
Le droit d'asile traditionnel régi par la Convention de Genève (1951) est
enrichi par deux autres types d'asile : l'asile constitutionnel et l'asile
territorial.
Il s'adresse aux personnes "persécutées en
raison de leur action en faveur de la liberté". Cette formule paraît
assez vague et pourra laisser à l'administration et aux Préfets le choix libre
d'interpréter selon leurs vœux le concept de la liberté ainsi que le concept
de persécution. L'arbitraire dans le traitement des dossiers de demandeurs
d'asile reste donc dans ce cas la règle du jeu.
Il est accordé par le ministère de l'Intérieur à
toute personne qui "établit que sa vie ou sa liberté est menacée dans
son pays ou qu'elle est exposée à des traitements contraires à l'article 3 de
la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés
fondamentaux : "Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou
traitements inhumains ou dégradants"". Mais les bénéficiaires de
cet asile ne bénéficieront que d'un titre de séjour précaire, ne dépassant
pas une durée d'un an.
L'avantage de l'introduction de ces deux types
d'asile est de permettre de régler quelques situations délicates. Comme par
exemple la situation des demandeurs d'asile Algériens. On s'est rendu compte
pendant quelques années que les bénéficiaires Algériens d'asile en France ce
sont surtout des islamistes parce qu'ils font l'objet d'une persécution
émanant de l'Etat alors que les démocrates Algériens voient leur demande
souvent rejetée parce qu'ils sont persécutés de groupes et non de l'Etat.
Cela est lié à l'interprétation quasi particulière faite par la France de la
Convention de Genève.
Le danger que présente ces deux types d'asile c'est
qu'ils peuvent ignorer les contraintes des dispositifs de la Convention de
Genève. A l'instar de la Convention de Dublin signée en 1990 entre Etats
européens dont la France, qui laisse aux Etats le soin de traiter les demandes
d'asile sans se référer aux conventions internationales.
Dans ce cadre, la gouvernement autrichien, qui occupe
actuellement la présidence de l'Union européenne, a transmis aux gouvernements
un "document stratégique" (dont l'AMF s'est procurée un exemplaire)
qui remet en cause le droit international des réfugiés garanti par la
Convention de Genève jugée
"dépassée et non adaptée pour traiter les situations actuelles. Le
document propose de reléguer le droit d'asile reconnu internationalement à une
sorte de faveur dépendant du bon vouloir de chaque gouvernement. Ce système de
discrétionnalité politique signifierait purement et simplement la fin de
l'asile en tant que droit.
* La nouvelle loi sur la nationalité
La question de la manifestation de volonté mise en
place sous l'article 21-7 du Code civil était au cœur de cette réforme du
droit de la nationalité. C'est effectivement cette modification de l'article
21-7 du Code civil qui est la plus importante dans la nouvelle loi.
En vertu de la nouvelle loi, l'enfant né en France
de parents étrangers deviendra automatiquement français à dix-huit ans (C.
civ., art. 21-7) , mais il pourra devenir français à seize ans, voire à
treize ans (C. civ., art. 21-11).
Aux terme de l'article 2 de la loi du 16 mars 1998
modifiant l'article 21-7 du Code civil, les jeunes étrangers nés en France de
parents étrangers n'auront plus à effectuer la démarche de manifestation de
volonté, et acquerront automatiquement la nationalité française à leur
majorité s'ils remplissent les conditions suivantes :
-
avoir leur résidence en France à la majorité,
-
et avoir eu leur résidence habituelle "pendant une période
continue ou discontinue d'au moins cinq ans, depuis l'âge de onze ans".
(C.
civ., art. 21-7 tel que modifié par L. n° 98-170. 16 mars 1998, art. 2).
A seize ans, l'enfant pourra réclamer la
nationalité française par déclaration "si au moment de cette
déclaration, il a en France sa résidence et s'il a eu sa résidence habituelle
en France pendant une période continue ou discontinue depuis l'âge de onze
ans"
(C.
civ., art. 21-11, al. 1er tel
que modifié par L. n° 98-170. 16 mars 1998, art. 6).
Pour l'enfant de treize ans, la nationalité
française pourra être réclamée en son nom et avec son consentement.
(C.
civ., art. 21-11, al. 2 tel que
modifié par L. n° 98-170. 16 mars 1998, art. 6).
L'immigration
et les violations des droits de l'Homme en France
La nouvelle législation française en matière de
l'immigration conserve malheureusement le même esprit de suspicion, de
sécurité et de contrôle qui régissait les lois précédentes. Cette
politique de l'immigration cautionne encore une fois l'idée selon laquelle
"l'immigration est responsable de tous les maux de la société française,
et en particulier le chômage". Alors qu'en même temps plusieurs
organismes, tels que l'OCDE ont montré qu'il n'y a pas de corrélation entre
les flux migratoires et le phénomène du chômage. L'INSEE va même jusqu'à
dire que la France aurait besoin de plus d'immigrés pour pallier au problème
de l'indemnisation des retraités et à celui concernant le déficit budgétaire
que connaît la caisse de la sécurité sociale.
La nouvelle législation suscite de notre part
plusieurs remarques :
q
Elle instaure clairement une certaine préférence européenne. Puisque les
citoyens issus de pays de l'Union européenne ou de pays de la Communauté
européenne économique se voient leur faciliter l'entrée et le séjour en
France, ainsi que l'accès à certains droits, tels que par exemple le droit au
vote.
q
La suppression du certificat d'hébergement et son remplacement par une simple
attestation d'accueil, pourra amener à favoriser les riches pour l'obtention de
visa. Quelqu'un qui a les moyens de réserver une chambre dans un hôtel aura en
effet plus de chance d'avoir son visa que d'autre qui n'appuiera sa demande que
par la simple attestation d'accueil.
q
La diversité et la multiplication des titres de séjour à durée d'un an
n'aboutira dans le temps qu'à gonfler les rangs de sans-papiers et le nombre
des précaires aux yeux de la loi et de l'administration française.
q
La loi du 11 mai 1998 refuse catégoriquement d'abolir la double peine selon la
quelle un jeune étranger issu de l'immigration, arrêté pour tel ou tel
délit, se voit condamner à une peine de prison et une peine d'expulsion du
territoire français à la fois. Il faut noter que le parlement européen avait
déjà inviter les Etats membres à éliminer toute possibilité de double
peine.
q
La suspicion persiste toujours en vers les étrangers en France. A titre
d'exemple, un étranger sans-papiers qui se marie en France fait l'objet d'un
contrôle permanent et d'une enquête rigoureuse pour soi-disant vérifier la
crédibilité du mariage.
q
La multiplication de statuts de droit d'asile ne vise en réalité qu'à une
volonté de dépasser la Convention de Genève et les traités internationaux en
matière de l'asile et des droits de l'Homme.
En ce qui concerne, la régularisation de certaines
catégories de sans-papiers, le processus a du mal à répondre à toutes les
situations. Ainsi nous nous pouvons que constater les disparités de traitement
des dossiers d'une préfecture à l'autre. Les sans-papiers célibataires ou
ceux sans charge familiale ont la part de lion du refus de régularisation.
Avec la fin de la date buttoir de dépôt du dossier
pour la régularisation, les notifications du refus de séjour et les
invitations à quitter le territoire français tombent sur les sans-papiers. Ils
sont 65 000 à voir leur demande rejetée par la Préfecture. Ils sont 45 000 à
effectuer les différents recours administratifs que permet la loi française.
Le déroulement des audiences dans les tribunaux administratifs et judiciaires
ainsi que les conditions dont vivent les sans-papiers dans les centres de
rétention sont dramatiques et insupportables.
;
Au niveau des audiences
w
La justice rend des décisions délirantes et les conditions de jugement sont
non conformes à la loi.
w
Les magistrats sont indifférents aux demandes de la défense, notamment quand
il s'agit de demander un interprète.
w
Les procédures sont très expéditives :
- l'étranger passe en audience le matin et le
jugement est rendu l'après-midi.
- Les audiences se passent dans des petites salles.
w
Dans les Tribunaux administratifs de Paris, 10 à 15 dossiers sont traités tous
les matins avant midi. Sur un dossier par exemple, qui comporte toute une
histoire de vie, on ne consacre que deux minutes d'audience. Dans ces
conditions, la plupart des jugements rendus sont négatifs.
w
Le Tribunal administratif de Paris ne motivera et ne notifiera le jugement que
plus tard c'est-à-dire après que l'intéressé est reconduit dans son pays.
;
Au niveau des centres de rétention
w
Les conditions hygiéniques sont souvent inexistantes. Dans plusieurs d'entre
eux, il n'y a ni savons ni serviettes et ni lieux pour avoir un entretien
confidentiel pour les étrangers.
w
Il n'y a pas de police féminine pour les femmes étrangères en rétention. Ici
nous vous envoyons à la tragédie dont était l'objet une citoyenne marocaine
à la Préfecture de Nanterre (dans la région parisienne). Depuis 7 ans en
situation irrégulière en dépit de plusieurs demandes de régularisation, elle
s'est présentée à la préfecture pour signaler son changement d'adresse. Elle
ignorait qu'un arrêté de reconduite à la frontière lui avait été
signifiée. Placée en garde de vue puis en rétention pendant une semaine.
Pendant qu'elle prenait sa douche, trois policiers chargés de sa surveillance
l'ont harcelé et agressé sexuellement.
w
Il n'y a pas de locaux collectifs pour les femmes.
w
Au centre de rétention de Versailles (Région parisienne) par exemple, les
détenus n'ont le droit ni au téléphone ni à l'accès à l'extérieur.
Le gouvernement français est entrain de préparer un
projet sur les centres de rétention. Il prévoit de centraliser ces centres.
Sur le plan pratique, le projet doit consister par exemple pour les Marocains
irréguliers à les mettre dans des centres de rétention les plus proches de
leur pays de destination (Sète en l'occurrence pour les Marocains). Ce projet
vise en réalité à entraver l'intervention des avocats et la mobilisation des
associations d'immigrés ou de soutien aux immigrés.
La convention de la sécurité sociale et son impact sur la femme marocaine
La conventions générale de la sécurité sociale
qui a été signée en 1965 et qui est entrée en vigueur en 1967 et la
convention relative au statut personnel et à l'aide juridique entre la France
et le Maroc qui a été signée en 1981 et qui est entrée en vigueur en 1983,
établit le principe de l'identité nationale (l'identité nationale pour la
femme marocaine résidente en France veut dire tout simplement l'application de
la Moudawana). C'est-à-dire concrètement dans les cas les plus courant, la
répudiation. Nous savons tous qu'il y a des voyages de répudiation,
c'est-à-dire des époux qui rentrent au Maroc pour répudier les épouses
résidentes en France.
Dans ce cadre, les tribunaux français sont de temps
en temps débordés par des plaintes émanant de femmes marocaines ou d'origine
marocaine parce que leurs époux marocains ou d'origine marocaine font de
voyages au Maroc et reviennent le plus souvent avec des notifications de divorce
ou d'autorisation de ventes des biens qui appartiennent en général aux deux
époux.
Notre association, l'AMF a défend une citoyenne
marocaine résidente en France et mariée avec un Marocain depuis 30 ans et ont
6 enfants. Pendant l'été dernier, l'époux est parti au Maroc et s'est
remarié avec une deuxième femme à l'insu de la première. Il a fait une
fausse déclaration auprès du notaire au Maroc en se prétendant qu'il est
célibataire. La première femme a porté plainte auprès d'un tribunal dans la
région parisienne et l'AMF soutient et défend ce cas.
En clair, un époux peut faire sortir son épouse qui
vit avec lui depuis des dizaines d'années et qui travaille pour élever ses
enfants, parce qu'il a entrepris un voyage de répudiation au Maroc ou tout
simplement parce qu'il a mandaté quelqu'un pour cet effet. C'est donc la loi
nationale qui domine dans ce contexte. C'est donc une discrimination flagrante
en vers la femme marocaine.
Les Hommes marocains préfèrent se marier et
divorcer sous la législation marocaine pour échapper aux contraintes de la
législation française qui contraint les époux qui divorcent de verser des
prestations à l'épouse et aux enfants.
La
convention de la sécurité sociale et son impact sur les travailleurs
Par exemple un travailleur marocain qui a travaillé
pendant 20 ans en France et qui est victime d'un accident de travail ou d'une
maladie professionnelle et qui retourne chez lui, lorsqu'il a besoin d'une
prothèse importante, il est obligé de faire une demande par la caisse
marocaine de maladie et de sécurité sociale et, celle-ci va demander à la
caisse française, qui va transmettre et attendre sa réponse et le travailleur
concerné ne sera jamais dans quel délai il va recevoir une réponse. Dans ce
cas, le travailleur marocain ne peut pas s'adresser directement à la caisse
française parce qu'il y a une convention franco-marocaine qui n'a pas prévu
ça.
Selon la même convention, plusieurs travailleurs
marocains, retraités actuellement, qui ont longtemps travaillé au Maroc ou en
Algérie avant 1956, c'est-à-dire sous l'occupation française mais que ni l'Etat
français ni l'Etat marocain ne leur reconnaît leur droit à la retraite.
Les saisonniers marocains qui sont recrutés en
France sur contrat à courte durée par des employeurs français, ne
bénéficient pas d'indemnités en cas de chômage. Les mineurs marocains n'ont
plus accès aux services de santé et de soins une fois qu'ils regagnent
définitivement leur pays ou y restent pour une longue période.
Le
comportement de l'administration marocaine vis-à-vis des Marocains en France
L'administration consulaire marocaine en France se
caractérise par la pratique monnaie courante du clientélisme et de la
corruption. L'accueil des Marocains dans les consulats se fait toujours dans des
conditions de désordre, de désorganisation et de la lenteur des différents
services. Il faut tout une journée pour un résident marocain pour pouvoir
acquérir un simple document administratif.
Nombre de Marocain sont confrontés dans les
consulats aux problèmes liés au choix de prénoms pour leurs enfants. Les
consulats refusent, et ce à plusieurs reprises, d'inscrire à l'état civil
marocain le prénom d'un enfant de résident marocain, parce que selon le
service consulaire d'état civil, le prénom n'est pas mentionné dans la liste
consulaire des prénoms ou il ne correspond à la religion. Plusieurs prénoms
arabes et bien musulmans ont été ainsi rejetés pour la simple raison parce
qu'ils ne sont pas indiqués dans la fameuse liste.
Quant au comportement des banques marocaines,
plusieurs retraités marocains ont procéder au transfert de leur compte dans
des banques françaises. Car les banques marocaines mettent beaucoup de temps
pour qu'enfin permettre aux retraités d'accéder à leurs prestations de
retraités.
Des résidents marocains qui ont décidé de créer
de projets économiques au Maroc pour contribuer au développement de leur pays,
ont fait l'objet de plusieurs tracasseries et de maltraitances de la part de
l'administration et des autorités marocaines. En effet, ces autorités exigent
de l'investisseur marocain un certain pourcentage sur le profit et dans
plusieurs cas ces autorités vont même jusqu'à tenter de s'imposer comme
associée au projet sinon le projet n'aura pas l'aval des autorités et ne
pourra pas voir le jour. Il faut noter ici, il y a quelques années, un
résident marocain originaire de la région de Figuig a purgé une peine de
prison parce qu'il a refusé la proposition des autorités marocaines de
s'imposer comme associées à son projet économique.
·
Permettre
à la femme marocaine de s'opposer au niveau du contentieux judiciaire à la
reconnaissance de la répudiation en France.
·
La
législation française doit primer sur la loi marocaine parce que celle-ci
favoriser la discrimination et l'égalité entre l'Homme et la femme. On
revendique dans cette situation la primauté de la loi du domicile sur la loi
nationale parce que la première est très égalitaire par rapport à la
seconde.
·
Refonte
globale du code du statut personnel (la Moudawana) en vue de réaliser
l'égalité parfaite entre l'Homme et la femme et en vue de son harmonisation
avec les traités internationaux concernant les droits humains et l'abrogation
de toute forme de discrimination vis-à-vis de la femme.
·
Liberté
de circulation de la femme marocaine résidente en France en cas de litige
matrimonial (Convention franco-marocaine du 10 août 1983).
·
Refonte
globale des accords bilatéraux franco-marocains dans le sens de promouvoir les
intérêts fondamentaux des Marocains en France, ainsi que leur mise en
conformité avec les textes internationaux en matière des droits humains et les
droits économiques, politiques, civiques, sociaux et culturels.
·
Malgré
les recommandations faites par les institutions internationales auprès du
gouvernement français, notamment l'Organisation internationale du travail
(OIT), les ressortissants marocains ne bénéficient pas de toutes les
prestations. Ces prestations font état de la nécessité d'être ressortissants
d'un pays ayant passé une convention de réciprocité avec la France (ce qui
n'est pas le cas des accords franco-marocains).